Vie du MEDEF

Revivez #LaREF23 - "#VoyagerOuPas. L'avenir des grands déplacements ?"

Avec Clément Beaune, Antoine Buéno, Augustin de Romanet, Marie-Ange Debon, Claire Martin, Christelle Morançais et animé par Raphaëlle Duchemin.

Verbatim

Clément Beaune : "On a un paradoxe, les transports c'est 30 % de la facture énergétique, comment combiner cela avec la mobilité, c'est toute la question."

"La restriction n'est pas la bonne réponse."

"Tous les modes de transport  doivent contribuer à la transition écologique. Même l'avion peut se décarboner."

Antoine Buéno : "Le risque majeur, ce n'est pas le réchauffement climatique, c'est la politique !"

"Si l'offre n'est pas capable de se verdir, on risque d'avoir aux manettes des politiques favorables à la décroissance."

"Ce serait catastrophique."

Christelle Morançais : "Les interdictions ne servent à rien ! Dans tous les aréroports, on constate une augmentation du trafic. Il faut regarder la réalité en face."

"On manque totalement de nuance. Il faut investir massivement en R&D pour innover."

Augustin de Romanet : "L'avenir des transports, ça va être le progrès technique."

"Jusqu'en 2019, le transport aérien négligeait totalement la décarbonation. il va falloir décarboner les aéroport, développer l'avion électrique, revoir le contrôle aérien, développer l'avion à hydrogène et développer les carburants de synthèse."

"Si le progrès technique n'est pas capable de parvenir en 2050 à la décarbonation du transport aérien, il faudra adopter des mesures restrictives,"

Marie-Ange Debon : "Le sujet de la mobilité est aussi celui de l'ouverture d'esprit."

"L'essentiel des kilomètres est routier, l'enjeu est de réformer le routier."

"Aujourd'hui, on a trop souvent une seule personne par véhicule, il va falloir trouver des solutions pour réduire cet autosolisme."

"On ne peut imposer des restrictions à des gens qui ont besoin de se désenclaver."

Claire Martin : "Dans le maritime, on va vers un transport décarboné plus sobre, mais aussi innovant."

"L'optimisation des routes maritimes est aussi un impératif."

"L'innovation passe par le digital, l'IA, mais aussi par des investissements massifs."

Antoine Buéno : "Pour effectuer la transition, on a deux leviers, le premier est la loi, et c'est une mauvaise solution, l'autre levier est le prix.Il faut que les transports polluants soient chers."

Clément Beaune : "On fera l'essentiel par le progrès technique ! Mais on ne peut opposer innovation et régulation, car c'est souvent la régulation qui enclenche l'innovation."

"Décarboner l'aviation nécessite le soutien de l'Etat."

Augustin de Romanet : "On essaie de faire de la pédagogie de l'offre."

"En obligeant les transporteurs aériens à utiliser des carburants plus chers, on va augmenter le prix des billets d'avion, donc induire automatiquement des restrictions."

Clément Beaune : "Le train est structurellement plus cher que l'avion, c'est un fait ! L'Etat subventionne déjà fortement le ferroviaire."

Christelle Morançais : "La question du financement pour les transports est le nerf de la guerre !"

"Si on veut encourager la mobilité douce, il faut se demander comment on finance les infrastructures nécessaires."

"L'ouverture à la concurrence peut aussi induire une baisse des coûts."

"Pour les entreprises, l'enjeu des mobilités est fondamental !"

Claire Martin : "Dans un système de transport mondial, les réglementations doivent être internationales."

"La transition vers un transport décarboné va nécessiter des investissements considérables, les innovations technologiques sont indispensables, mais coûteuses, surtout au début de leur mise en œuvre. Cela peut se traduire par une augmentation des prix du transport et, par conséquent, par une augmentation du prix des marchandises transportées."

Marie-Ange Debon : "Il y a trois leviers de financement, le tarif, les taxes et la performance des opérateurs via la concurrence.

"L'équilibre entre les trois doit être travaillé par l'ensemble des acteurs."

Clément Beaune : "Il y a deux modes de financement, l'usager et le contribuable. L'usager doit aussi accepter de payer."

Augustin de Romanet : "Le tourisme, c'est 10 % du PIB sans avion, nous n'avons pas de tourisme."

Antoine Buéno : "Tout est à faire ! Mais attention au risque d'augmentation des inégalités."

Christelle Morançais : "N'opposons pas les territoires entre l'urbain et le rural ! La question des mobilités se pose différemment dans un cas et dans l'autre."

Claire Martin : "Travaillons tous ensemble pour offrir des moyens de transports décarbonés !"

Marie-Ange Debon : "La mobilité est en train de bouger, nous sommes au début de cette révolution."

Clément Beaune : "On a fait toutes les grandes révolutions industrielles, avec des innovations qui ont fait rêver tout le monde, il faut continuer."

Pour aller plus loin

Voyager ou ne pas voyager ? C’est sans aucun doute LA question que se posent aujourd’hui des millions de personnes à travers le monde, face aux dangers du réchauffement climatique et à la nécessité de réduire notre empreinte carbone. Mais après deux années de paralysie due au Covid, l’envie de voyage est énorme, comme le montre une récente enquête réalisée auprès des utilisateurs de CheckMyTrip dans quarante pays. Alors voyager oui, mais comment ?

Prendre l’avion ou pas ?

Faut-il notamment arrêter de prendre l’avion, comme le préconise Jean-Marc Jancovici, pour qui chacun devrait se limiter à quatre trajets en avion sur toute une vie ? Une proposition qui, bien sûr, provoque incompréhension et colère chez les particuliers comme chez les voyagistes et les professionnels de l’aérien, d’autant que pour le moment, aucune technologie de remplacement n’est disponible.

Le secteur aérien pèse actuellement environ 2,5 % des émissions de CO2 au niveau mondial. Cela peut sembler peu, mais c’est un chiffre en constante augmentation. Selon les chiffres de la Banque mondiale, le trafic aérien (en nombre de passagers) a été multiplié par près de 15 en 50 ans et il continue d’augmenter de 5,6 % par an.

Pour certains observateurs, le transport aérien est aussi un marqueur important de l’injustice climatique : « les principaux émetteurs sont les populations les plus aisées, tandis que les premières victimes des conséquences du changement climatique sont des personnes qui ne seront, pour la plupart, jamais montées dans un avion ». A l’échelle mondiale, 90 % des gens ne sont en effet jamais montés dans un avion.

Conscients du problème, les avionneurs multiplient les efforts pour développer des avions plus verts : kérosène de synthèse, agrocarburants valorisant les déchets de l’agriculture, moteurs à hydrogène… Mais, si de réels progrès ont été accomplis, les limites techniques semblent aujourd’hui quasi atteintes. Malheureusement, l’avion zéro carbone ne semble pas être pour demain !

Ceux qui m’aiment prendront le train ?

À l’arrivée en gare, la SNCF remercie aujourd’hui les voyageurs « d’avoir choisi le mode de transport le plus écologique ». Mais dans quelle mesure est-ce vrai ?

Certes, selon l’Ademe, sur certains trajets, l’impact climatique de l’avion peut être jusqu’à 80 fois plus important que celui du train. C’est un critère auquel les voyageurs sont de plus en plus sensibles et qui explique pourquoi certains refusent aujourd’hui de prendre l’avion. Il est toutefois difficile de déterminer avec précision l’équivalent de CO2 émis par un passager de train ou d’avion. Les comparateurs ont en effet encore tendance à sous-estimer les émissions de CO2 du train, et la SNCF vient même d’être accusée de publicité mensongère par le jury de déontologie publicitaire pour certaines de ses campagnes, affirmant que « voyager en train à grande vitesse, c’est 50 fois moins de CO2 émis que pour un voyage en voiture et 80 fois moins qu’en avion », étaient de nature à tromper le public. Si le train est de loin le mode de transport le moins polluant, l’écart ne semble pas aussi important et surtout ce qui freine les voyageurs, c’est le prix des billets, car, comme le souligne un récent rapport de Greenpeace, prendre le train est beaucoup plus cher que prendre l’avion. Le droit de péage ferroviaire, qui en France représente quelque 40 % du prix des billets de train, explique en partie cela. En plus, si l’on tient compte des temps de trajets, l’avion reste imbattable pour les moyens et longs trajets, même si l’on prend en compte les trajets jusqu’à l’aéroport et les formalités d’enregistrement.

Alors, faut-il vraiment préférer le train ? La question reste entière et tout dépend de ce que l’on recherche.

Et quid de la voiture ?

Les Français restent très attachés à leur voiture qui est souvent pour eux un symbole de liberté. Cependant, force est de constater qu’elle représente un double fardeau, écologique et sanitaire. La voiture individuelle est en effet responsable de plus de la moitié (53 %) des rejets du secteur des transports, alors même que notre parc automobile ne cesse de croître. Les pouvoirs publics, conscients du problème, cherchent d’ailleurs à promouvoir les véhicules électriques, réputés plus verts. Selon l’Ademe, « la voiture électrique émet entre 2 et 3 fois moins de CO2 qu’une voiture thermique si l’on prend en compte l’ensemble de son cycle de vie ». Mais l’électrique coûte cher et ne représente aujourd’hui qu’à peine 2,5 % du parc total. Qui plus est, une voiture électrique n’est jamais zéro carbone, sa fabrication a un impact carbone supérieur à celui d’un véhicule thermique, sans même parler de la production des batteries.

Mais pour bien mesurer les émissions liées à chaque moyen de transport, encore faut-il prendre en compte le nombre de passagers concernés. Le gros problème de la voiture individuelle est que très souvent un seul passager est à bord. Toujours selon l’Ademe, « pour un trajet de 51 km en voiture thermique, l’empreinte carbone par passager passe de 11 kg de CO2e sans covoitureurs à 6 kg avec un covoitureur et tombe même à 2,8 kg de CO2e avec trois covoitureurs ».

Focus sur le transport de marchandises

Même s’il ne s’agit pas là de voyages au sens touristique du terme, difficile de passer sous-silence les transports de marchandises et leur impact carbone, à l’heure où tout le monde cherche à réduire les émissions de gaz à effets de serre pour sauver la planète.

Avec quelque 700 000 camions, le parc français de poids lourds ne représentent que 2 % du parc français de véhicules. Ces camions assurent 80 % du transport de marchandises. En 2019, ils ont émis 22 % des émissions de gaz à effet de serre de l’ensemble du secteur des transports, mais selon la Fédération nationale des Transporteurs routiers, « cela ne représente aujourd’hui que 7,2 % du total des émissions de CO2 françaises », une prouesse environnementale louée par l’organisation, même si tout le monde ne partage pas cet avis. Quant au fret maritime, il ne cesse de prendre de l’ampleur et pourrait doubler d’ici 2050. Certes, la pollution du transport maritime ne représente actuellement que 3 à 4 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, mais, si rien ne change, ces émissions pourraient atteindre 17 % en 2050. Et, en plus des gaz à effet de serre, les navires relâchent dans l’atmosphère des particules fines et de l’oxyde d’azote, dangereux pour l’environnement et la santé.

L’optimisation des transports de marchandises avant l’échéance de 2050 reste donc une priorité et les professionnels multiplient les efforts en ce sens : camions électriques, carburants plus propres, comme le méthanol pour les bateaux, etc. Mais tous ces changements prennent du temps.

Des grands projets ont par ailleurs été entrepris en France et en Europe, pour faciliter les déplacements. La ligne Lyon-Turin par exemple, déclarée d’utilité publique dès 2013 ; elle est censée faciliter les flux de transport de marchandises et favoriser le report de la route vers le rail. Selon la société franco-italienne Telt, en charge du projet, cette ligne permettrait « de délester les routes alpines d’un million de poids lourds et de réduire chaque année les émissions de gaz à effet de serre d’environ un million de tonnes d’équivalent CO2 ». Ce projet rencontre toutefois une forte opposition des pro-environnement, en France comme en Italie, au motif qu’il va détruire des terres agricoles et la montagne.

Autre projet : le canal Seine-Nord Europe. En 2030, il devrait devenir un maillon central de la liaison fluviale européenne Seine-Escaut. Il permettra le transport de bateaux transportant l’équivalent de 220 camions. Au total, ce serait un million de camions qui seraient retirés du réseau routier français chaque année et une nette réduction des émissions de CO2.

Repenser le voyage

Alors que faire ? Avion ou pas, une chose est sûre, le désir de voyager est intact. Mais la pandémie d’une part et la prise de conscience climatique d’autre part viennent bouleverser certains comportements. Les Français voyagent désormais moins longtemps, moins souvent et moins loin. Le tourisme de proximité, en France ou dans les pays limitrophes, s’est considérablement développé. Les familles privilégient notamment ce type de destinations accessibles en voiture ou en train.

Par ailleurs, on constate un intérêt accru pour des vacances plus proches de la nature.

Le tourisme durable devient bien sûr une priorité. Selon une enquête Statista de 2020, 62 % des millenials et de la génération Z se décrivent comme des « voyageurs verts », c’est-à-dire des voyageurs qui ont renoncé au moins une fois au cours des six derniers mois à un voyage afin de réduire leur empreinte carbone.

Enfin, les touristes ont désormais tendance à ne plus programmer leurs voyages longtemps à l’avance, mais à se décider à la dernière minute.

Le tourisme de masse semble de ce fait en très nette perte de vitesse et les voyageurs se montrent de plus en plus soucieux de trouver du sens dans leur manière de voyager.

Face à ces bouleversements comment s’adaptent les acteurs du tourisme ?

Un secteur qui doit se réinventer

Le tourisme est un secteur économique qui représente une part importante du PIB pour de nombreux pays. En 2020, il pesait 10 % du PIB mondial et employait 250 millions de personnes à travers le monde. Malmené par la pandémie et face à l’urgence climatique, le secteur est aujourd’hui à un tournant et est contraint de se réinventer afin de devenir plus « durable ».

Le tourisme durable est défini par l’OMT (Organisation mondiale du Tourisme) comme « un tourisme prenant en compte ses impacts économiques, sociaux et environnementaux en répondant aux besoins des visiteurs, des professionnels, de l’environnement, et des communautés d’accueil ». Ce tourisme s’appuie notamment sur des modes de déplacement, de production et de consommation écoresponsables.

Les pistes d’action sont multiples et ne se résument pas à l’utilisation de moyens de transports bas carbone. Le maître mot est sobriété du voyage. En plus de répondre aux exigences sociales et sociétales, ce nouveau tourisme durable est le moyen pour le secteur de s’adapter aux nouvelles attentes des consommateurs.

Selon un sondage Ifop, 44 % des Français se disent d’ailleurs prêts à payer plus cher leur séjour afin de voyager de manière responsable et respectueuse de l’environnement et 80 % estiment que c’est avant tout aux professionnels du tourisme de s’occuper de la réduction des impacts de leurs activités sur l’environnement.

L’époque des grands voyages à travers le monde est-elle vraiment révolue ? Face au dilemme « voyager et découvrir le monde » vs « ne pas polluer », que peuvent faire les voyageurs, mais aussi les transporteurs, les voyagistes et les constructeurs ?